LA COURSE A LA MAISON BLANCHE

Les concurrents

Barack Obama

Joe Biden

John McCain

Sarah Palin

Bob Barr

Ralph Nader

Hillary Clinton

Bush & Co.


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    Les primaires

Organisation des primaires

En 2007, l'élection présidentielle était entendue : Hillary Clinton serait opposée à Rudy Giuliani, l'ancien maire de New York. Un seul détail à régler : les primaires, qui n'ont bizarrement pas marché comme prévu. Les américains n'ont pas retenu les leçons des européens : dès qu'on demande aux électeurs ce qu'ils veulent, ça fout le bordel.

Les primaires sont maintenant finies depuis plusieurs mois, des candidats non attendus ont été élus, l'élection générale a commencé début juin, avec l'abandon de Clinton. C'est du moins ce qu'on considère, mais ce n'est pas exactement vrai. Les primaires ne sont officiellement terminées que lors de la convention nationale des deux grands partis, lorsque les candidats sont officiellement désignés, élus par les participants à la convention. Ceci a une importance au niveau des finances. Lorsque quelqu'un donne de l'argent à un candidat, il doit dire s'il donne pour les primaires ou l'élection générale, les deux caisses ne se mélangent pas. Obama et McCain ont donc jusqu'à fin août - début septembre pour dépenser leur argent des primaires. McCain ayant accepté l'aide publique pour la générale, il utilise en ce moment l'argent non limité donné par ses électeurs, et n'utilisera les 85 millions $ de l'état que sur les deux mois de septembre et d'octobre. Obama, lui, doit continuer à récolter de l'argent, ce qui lui prendra du temps, élément de plus en plus précieux au fur et à mesure qu'on se rapproche du scrutin, mais pourra dépenser tout l'argent qu'il aura récolté.

Les primaires sont donc les élections où les partis choisissent leurs candidats. Leur fonctionnement est assez semblable à celui de l'élection générale. 51 scrutins indirects sont organisés en parallèle pour chaque parti (en fait, un peu plus : certains territoires, comme Guam ou les îles vierges, votent pour les primaires mais pas pour la générale). Une seule grande différence : les différents scrutins n'ont pas lieu le même jour. Chaque état est responsable des règles qui régissent son scrutin, à condition de respecter certaines règles imposées par l'échelon national du parti. Les états ne désignent pas des grands électeurs, mais des délégués qui le représenteront à la convention nationale. Certains délégués assistent à la convention nationale de par leur rôle dans le parti (responsables du parti dans l'état ou au niveau national) ou dans les gouvernements locaux (sénateurs, gouverneurs, représentants, etc.). Ils sont appelés délégués automatiques, ou superdélégués. Les autres sont choisis d'après les résultats du vote, de manière à représenter les choix des électeurs. La distribution des délégués est décidée par le parti national selon des critères "maison" : population, habitudes de vote lors des élections précédentes, etc.  Les deux grands partis n'avaient d'ailleurs pas le même nombre de délégués : 2380 chez les républicains, 4234 chez les démocrates.

L'autre grande différence entre les scrutins des démocrates et des républicains est l'attribution des délégués. Chez les républicains, le vainqueur d'un état gagnait tous les délégués en jeu, alors que chez les démocrates, ils étaient distribués entre les candidats ayant obtenu plus de 15 % des voix, proportionnellement à leur score. Dans certains états, le scrutin est une primaire, c'est-à-dire un simple vote. Dans d'autres états ont lieu des caucus. Ce sont des rassemblements d'électeurs, qui vont discuter entre eux, essayer de se convaincre les uns les autres, pendant des heures. Au bout d'un moment, des groupes se forment dans différents endroits de la salle où a lieu le processus (gymnase, école, église, etc.) selon la personne pour qui ils votent. Ensuite, les candidats ayant moins de 15 % des voix sont éliminés, et les électeurs rediscutent pour reformer de nouveaux groupes, Ces caucus servent à ce que le choix ne soit fait que par des gens politiquement très engagés, et donc fassent leur choix en connaissance de cause, après débat, et pas après un simple vote de quelques minutes. Ils ont aussi la particularité d'être avantageux pour les candidats les mieux organisés. On ne pensait pas que les jeunes puissent jouer un rôle dans ces caucus ; la campagne d'Obama a prouvé le contraire. Une variante amusante : au Texas, où voter à une primaire est nécessaire pour s'inscrire à un caucus, ce qui a permis à Bill Clinton de dire que c'est "le seul endroit où on peut voter deux fois dans la même élection sans aller en prison".

Qui peut participer au vote ? Ca dépend des états, là aussi. Certains scrutins sont "ouverts", d'autres "fermés", avec un paquet de variantes. Un scrutin fermé n'est ouvert qu'aux électeurs enregistrés pour un des partis ; un ouvert est accessible à qui le désire. Entre les deux, les états où on peut choisir de s'inscrire sur place.

Si ces variantes peuvent paraître de simples détails, elles sont pourtant essentielles pour comprendre les positions des candidats dans chaque état. On se placera plus près des positions des activistes dans les primaires fermées, on pourra jouer sur les indépendants lors des ouvertes. On organisera ses "troupes" différemment, en faisant des campagnes différentes, pour un caucus ou une primaire.

Chez les démocrates

Les primaires démocrates ont été traités en détails, et vont probablement être l'objet de nombreuses études politiques. Je vais essayer de ne pas répéter ce qui a été dit partout, et me concentrer sur les points qui ont vraiment entraîné la victoire d'Obama.

Sur les 7 candidats, il est très vite apparu, dès le début 2007, que seuls 3 auraient une chance, et même que ce serait difficile pour John Edwards. Barack Obama semblait intéressant, mais Hillary Clinton restait la favorite.

Les élections commençaient officiellement le mardi 5 février, le SuperTuesday, mais 4 états avaient l'autorisation de placer leurs élections plus tôt : Iowa (caucus le 03/01), New Hampshire (primaire le 08/01), Nevada (caucus le 19/01), Caroline du Sud (primaire le 26/01). Ces états, en particulier l'Iowa, sont très avantagés par ce système. La logique est d'empêcher un candidat d'"acheter" une élection en faisant une campagne publicitaire TV massive, et d'obliger les candidats à rencontrer, dans des états relativement peu habités, beaucoup d'électeurs, et donc d'être soumis à de très nombreuses questions, afin de ne retenir que des candidats solides.

Le Michigan et la Floride ont d'ailleurs avancé leurs dates de primaires, respectivement au 15 janvier et au 29 janvier, en contradiction des règles (des deux partis). Ils ont finalement été punis d'une part en ayant une délégation réduite, mais surtout les candidats n'ont pas vraiment fait campagne dans l'état : les envies spécifiques des électeurs de ces deux états ont pu être simplement ignorées par les candidats, sans trop de risque.

Mieux organisé, Obama a gagné le caucus de l'Iowa devant John Edwards, Hillary Clinton finissant, à la surprise générale, seulement troisième. Elle qui avait hésité à faire vraiment campagne dans cet état a apparemment souffert du manque de préparation de son équipe (son sondeur / stratège, Mark Penn, se concentrait sur les sondages à 7 candidats qui la montraient en tête, et pas à ceux entre les 3 candidats à plus de 15 % des voix).  Faire campagne en se basant sur l'inévitabilité, et donc sur l'invincibilité et commencer par une défaite a été catastrophique pour Clinton.  Obama était intéressant, pour certains enthousiasmant, mais n'avait pour beaucoup aucune vraie chance. On pensait que son meilleur pari était de viser la vice-présidence de Clinton. Sa victoire lui donnait une crédibilité instantanée, et l'a même rendu favori pour la victoire finale... pendant quelques jours.

A l'approche de la primaire du New Hampshire, l'équipe Clinton était en lambeaux, complètement désorganisée, en pleine phase d'opposition interne entre différents camps et clans. Le week-end précédent le vote, les sondages donnaient Obama même gagnant, ce qui aurait probablement terminé la campagne primaire dès son début. Mais Clinton arrache une victoire surprise, peut-être liée à l'image qu'elle donne juste avant le vote, pour une première fois apparaissant humaine, ouverte et essuyant quelques larmes en évoquant la difficulté de la campagne.

La campagne est alors réellement lancée, et Obama et Clinton se partagent le Nevada pour Clinton et la Caroline du Sud pour Obama. Mais à ce moment se dessinent deux nouveautés, qui vont devenir très importantes par la suite. Au Nevada, si Clinton gagne plus de voix, l'équipe Obama déclare également la victoire, sous le "prétexte" qu'ils ont obtenu plus de délégués. Les journalistes ne relèvent pas tout de suite l'importance ; il est rare que le compte des délégués ait finalement une importance : c'est le candidat qui gagne le plus d'états qui finit par gagner facilement. L'équipe Clinton n'est pas prête à ce petit jeu de grignotage des délégués, au contraire de celle d'Obama. Au fur et à mesure que le temps passe, on comprendra que c'est Obama qui avait raison, et que seul le compte des délégués a une importance, et leur tactique de maximisation du nombre de délégués, et pas du vote, est la meilleure. En Caroline du Nord, Bill Clinton donne l'impression qu'Obama n'y gagne, comme l'avait fait Jesse Jackson, autre candidat noir, en 1984, que parce qu'il est noir. C'est le genre d'histoires que les journalistes savent traiter, et parfois trop, et le résultat est que l'électorat noir finit de rejoindre Obama (ce qui n'était pas du tout acquis à l'origine : les Clinton étaient très populaires chez les noirs, et Obama était parfois taxé de ne pas être assez noir...).

La suite est relativement simple, et se passe en trois phases.

• Le SuperTuesday est globalement un match nul. Clinton gagne les grands états où ont souvent lieu des primaires, mais Obama gagne plus d'états, et généralement les caucus avec des marges importantes, récupérant les retards pris dans les grands états. Le nombre de délégués est à peu près le même.

• Dans le mois qui suit le SuperTuesday, Obama enchaîne les victoires. L'équipe Clinton ne s'attendait pas à ce que la course soit réelle, elle n'a rien de prêt, pas d'organisation dans les états. Obama en profite : il rafle 11 votes consécutifs, avec des scores souvent compris entre 60 et 70 %. Il gagne environ 125 délégués de plus que Clinton dans cette période, ce qui est l'écart total à la fin des primaires. Les primaires ont duré 4 mois, c'est entre le 9 et le 19 février qu'Obama gagne toute son avance. Le 19 février, pour le primaire du Wisconsin, état majoritairement blanc et ouvrier, donc qu'on pourrait supposer favorable à Clinton, Obama gagne avec 58 % des voix. J'étais en Amérique ce jour-là ; pour moi, c'était fini.

• 15 jours après le Wisconsin, c'est l'Ohio et le Texas (plus deux autres, dont personne ne s'est soucié), des états qu'on donnait très favorables à Clinton. Elle gagne de peu au Texas, et de 10 points en Ohio, après avoir mené une campagne plus agressive. A partir de là, on rentre dans une phase assez étrange : Clinton doit rattraper son retard en délégués, ce qu'elle ne fait pas, mais elle arrive à mettre l'accent "médiatique" sur les états qui lui sont les plus favorables. Obama n'arrivant pas à les gagner de manière convaincante, la course continue... même si rien ne change vraiment. En fait, elle n'a aucune chance, sauf si la candidature d'Obama explose à cause d'un scandale. Entre le Texas / Ohio début mars et le vote suivant, le 22 avril en Pennsylvanie, 1 mois et demi de gamberge exaucent presque le souhait de Clinton : le pasteur Wright, ses commentaires très mal pris par l'opinion publique donnent un vrai coup à la candidature Obama. Mais son superbe discours sur la race aux USA, et le temps qui passe, finiront, après quelques rebondissements, par éteindre le feu.

Clinton, continuant à faire à chaque vote mieux que ce qu'on attendait d'elle, donne l'impression de pouvoir revenir, même si ça reste à peu près uniquement une vue de l'esprit. Le jour où pour la première fois, elle fait moins bien que ce qu'on pensait, en ne gagnant l'Indiana le 6 mai que de 2 % pendant qu'Obama triomphait en Caroline du Nord. Bien que rien n'ait changé considérablement, le public américain comprend que c'est réellement fini. L'équipe Clinton fera encore durer le spectacle quelques temps, et va jusqu'au bout, début juin, après encore un paquet de scandales et des tracasseries administratives inutiles sur le sort de la Floride et du Michigan. 

Un point important sur la primaire démocrate, qui la différencie fondamentalement de la républicaine : les propositions des candidats importants étaient parfois différentes, mais sans représenter des conceptions ou des camps opposés. Pour faire simple, ils étaient d'accord sur à peu près tout, et se battaient sur les compétences personnelles : jeunesse, honnêteté, expérience, entre autres étaient les mots clés. Du coup, les oppositions n'étaient pas politiques, donc rationnelles, mais humaines, et donc émotionnelles. Toute critique d'un candidat était vue par les électeurs comme des insultes personnelles, magnifies par les composantes raciales et sexuelles : homme vs. femme, noir vs. blanc. Ceci explique pourquoi les cicatrices mettent du temps à se soigner chez les démocrates. Certains électeurs voient toujours l'élection sur des bases culturelles et humaines, et dans ce schéma Clinton est plus proche de McCain que d'Obama. Mais les positions politiques sont opposées, et les démocrates vont probablement rester démocrates le jour de l'élection venue.

Chez les républicains

Plusieurs éléments ont été très importants dans le déroulement des primaires républicaines. D'abord, les républicains se définissent généralement comme conservateurs : plus on est conservateur, mieux ça vaut. Les primaires tournent parfois à la bataille à "qui est le plus conservateur". Les conservateurs ont normalement 3 piliers, (du moins dans leur communication, parfois un peu simpliste): rôle limité de l'état fédéral, incluant programmes sociaux réduits et surtout impôts faibles ; importance de certaines valeurs religieuses et familiales, avec par exemple opposition au mariage gay et à l'avortement ; patriotisme exacerbé. Mais certains sont plus intéressés par un seul de ces aspects, on parle alors de conservateurs fiscaux, de conservateurs sociaux, et de conservateurs nationaux. Dans cette primaire, tous ces courants ont été représentés, presque par des caricatures de cette description (qui est déjà assez simpliste, je sais). Ils  se sont affrontés assez frontalement, l'enjeu étant de la succession de Bush et du Bushisme.

Bush a été un des rares républicains depuis Reagan à faire l'unanimité dans les trois types de conservateurs, et même à séduire un électorat centriste, modéré. En chute libre dans les sondages, désormais presque totalement rejeté par le pays, il reste pourtant extrêmement populaire dans la base du parti républicain. La primaire a donc parfois consisté pour les candidats, aucun n'étant considéré un conservateur "parfait", à se rapprocher de Bush sur ces trois piliers, en affirmant par exemple que les réductions d'impôt massives, la guerre en Irak et la nomination de juges anti-avortement à la cour suprême sont leurs positions depuis toujours.

Par rapport à la primaire démocrate, la républicaine était très ouverte. Au matin du premier vote, sur 7 candidats, 4 ou 5 sont considérés des vainqueurs potentiels, un sixième a peu de chances mais est extrêmement populaire dans une certaine partie de l'électorat, seul le 7ème, Duncan Hunter, n'aura aucun impact dans la course. D'ailleurs, je n'en parlerai plus. Les autres candidats sont :

• Mitt Romney, conservateur fiscal : hommes d'affaires millionnaire, ancien gouverneur du Massachussetts, mormon, ancien PDG des JO d'hiver de Salt Lake City, pas fondamentalement opposé au mariage homosexuel ou à l'avortement. Soutenu par les cadres du parti et ses donneurs les plus riches. S'est rapproché trop fort et trop brutalement des conservateurs sociaux, qui se méfient de toute façon d'un mormon, et s'est fait accuser de retourner sa veste sans arrêt sur toutes les positions sociales fondamentales. Sa plus grande qualité : il a l'air d'un président. Par contre, il n'a rapidement eu aucune crédibilité.

• Mike Huckabee, conservateur social : ancien pasteur et gouverneur de l'Arkansas (comme Bill Clinton, qui vient de la même ville que lui, Hope), très croyant, très sympathique, proche des gens, drôle, le meilleur des candidats des deux partis pour faire campagne, dans la rue ou à la télé, mais complètement barré si on regarde certaines de ses idées (remplacer la constitution par les 10 Commandements ?). Pas favorable à la guerre en Irak, plutôt partisan d'un état proche des gens, et surtout assez opposé aux grandes compagnies

• John McCain, conservateur national : ancien militaire et prisonnier de guerre au Vietnam, McCain était fixé sur la guerre en Irak, au point que sa campagne était considérée morte courant 2007, quand il affirmait que tout se passait bien à Bagdad. Il a été aidé par la réduction du nombre de morts et surtout de la fin de la couverture médiatique étouffante sur la guerre. Opposé à Bush en 2000, considéré honnête et indépendant, il est devenu très apprécié des modérés (et des journalistes), beaucoup moins de la "base" du parti : il était critique envers les réductions d'impôts de Bush et son attachement aux évangélistes, les conservateurs fiscaux et sociaux le craignent donc un peu.

• Rudy Giuliani, conservateur national : ancien maire de New York pendant les attaques du 11 septembre, il fait campagne sur son courage lors de ces événements. Son principal problème est que républicain à New York ne signifie pas la même chose que dans le Sud. Marié trois fois, coureur notoire, il a des positions sur les problèmes sociaux qui ne collent pas à la base. Il était en tête des sondages en 2007, avant que quelques scandales et surtout une meilleure campagne de McCain sur des thèmes proches ne le mettent en danger. Il a fini de se couler tout seul en menant une très mauvaise campagne : il a décidé de faire l'impasse sur les premières primaires pour se concentrer sur la Floride et son poids électoral plus important. Il était apprécié des Floridiens, mais ses résultats catastrophiques en Iowa et au New Hampshire ont laissé la couverture médiatique à McCain, Romney et Huckabee. Le temps que le vote en Floride, les électeurs avaient presque oublié qu'il se présentait.

• Fred Thompson, conservateur "complet" mais faible : Il a participé activement mais surtout derrière les rideaux à l'affaire du Watergate, il a un ensemble de positions très favorables pour se présenter à une primaire républicaine, un parcours professionnel assez réussi et sans tâche majeure et une reconnaissance nationale grâce à sa participation comme acteur aux différentes séries "Law & Order" (il est un rare politicien devenu acteur plutôt que le contraire, comme Reagan ou Schwarzenegger). Pourtant, son manque d'enthousiasme évident a complètement plombé sa campagne, mal dirigée, même s'il a joué un rôle indirect crucial dans la victoire de McCain.

• Ron Paul , conservateur tendance libertarien : ancien candidat libertarien à la présidence, il en a conservé de nombreuses positions, certaines très appréciées des conservateurs (réduction forte du rôle de l'état), d'autres beaucoup moins (légalisation de la marijuana, interdiction de la peine de mort). Dans l'ensemble, il n'a eu aucune chance réelle de gagner, mais il est très populaire, très bien financé, et de nombreux jeunes lui vouent un "culte" impressionnant. Il a prévu une sorte de convention pirate en parallèle à la convention nationale républicaine, et ses fans arrivent encore à perturber des événements républicains en "infiltrant" certains comités.

La première étape de la campagne était le caucus de l'Iowa, où les candidats passent traditionnellement beaucoup de temps et rencontrent de très nombreuses personnes pour pouvoir gagner. A la surprise générale, c'est le sympathique Huckabee qui a séduit les Iowans (30%), de peu devant Romney et ses millions (27%). McCain, comme en 2000, n'a pas réellement fait campagne dans cet état. Il termine troisième ex-aequo avec Thompson (12%) et devant Paul (7%) et Giuliani (6%). Mais il a été très présent dans le New Hampshire, qui l'avait déjà chois en 2000 et où le système de primaire ouverte l'avantage, car il est plus populaire chez les indépendants que chez les purs républicains. Il gagne cette primaire devant Romney, Huckabee et Giuliani (37 - 32 - 11 - 9%).

Après avoir deux défaites et une victoire inaperçue lors du caucus du Wyoming, Romney se relance en gagnant la primaire du Michigan devant McCain (39 - 30%), pendant que Huckabee fait l'impasse pour préparer la Caroline du Sud, état qui l'avantage plus. Romney gagne aussi dans le Nevada, porté sans surprise par les nombreux mormons qui peuplent cet état frontalier de l'Utah, mais néglige la Caroline du Sud.

Huckabee tente d'y confirmer son succès de l'Iowa. Dans cet état très conservateur à tendance religieuse, qui avait signé la défaite de McCain en 2000, il est le favori. Mais Thompson, de l'état voisin du Tennessee, joue son va-tout et attaque fortement Huckabee, assez pour que l'électorat religieux se partage entre les deux : McCain gagne avec 33% contre 30% à Huckabee, 16% à Thompson et 15% à Romney. Thompson sait qu'il a perdu et abandonne, mais en ayant sévèrement handicapé celle de Huckabee, laissant son vieux pote McCain affronter Romney en Floride, sur laquelle Giuliani avait basé toute sa campagne. Mais les premiers états ont mis tout l'accent médiatique sur les trois gagnants successifs, l'ignorant complètement. Il termine avec seulement 15 % des voix, devancé par McCain avec 36 % et Romney (31 %).

Cette victoire termine la "vraie" campagne républicaine. Sentant dans quel sens le vent tourne, les républicains s'alignent derrière McCain, Giuliani en premier. Romney aurait pu faire traîner les choses, à la Clinton, mais après les résultats décevants du Super Tuesday, lève l'éponge et soutient McCain. Le reste de la primaire n'est qu'un tour d'honneur assez difficile pour McCain, où il gagne à peu près tous les états, mais avec des scores rarement impressionnants, en général car un grand nombre d'électeurs  se déplaçant pour voter le font pour se plaindre de McCain.

Chez les républicains comme chez les démocrates, les primaires se seront jouées à peu de choses. Et si le candidat choisi, McCain, est probablement celui qui a le plus de chances de battre un démocrate en novembre dans une ambiance très peu favorables aux républicains, le sort y a été pour beaucoup. Personnellement, je pense que le rôle de Thompson en Caroline du Sud a été crucial : s'il se retire avant devant l'évidente impossibilité de gagner, Huckabee gagne probablement, et McCain n'est probablement plus le grand favori en entrant dans les concours importants de Floride et du Super Tuesday. Qui sait alors ce qui aurait pu se passer...