Qui est John McCain ?
C'est avant tout un militaire. Il est né sur une base militaire située au canal de Panama (ce qui fait dire à certains, sans réelle portée, qu'il ne respecte pas les conditions constitutionnelles pour être président des USA). Son grand-père, son père et son fils aîné, qui portent le même nom que lui, sont tous militaires dans la Navy.
Son existence est marquée par son passé de prisonnier de guerre : il est resté prisonnier au Vietnam de 1967 à 1973. Politiquement, il en a gardé un statut de héros et un capital de sympathie qui ont facilité son entrée en politique à la fin des années 70, sa carrière au Sénat et ses deux campagnes présidentielles (il fut candidat malheureux contre George W. Bush en 2000), mais ces années lui ont également laissé des séquelles physiques (cicatrices au visage, limitations des mouvements des bras) qui renforcent, malgré son énergie, l'image d'un homme âgé.
Le plus grand atout de McCain est sa réputation. Au début de sa campagne, il est déjà un des politiciens les plus connus et les plus respectés des USA, aussi bien pour son service que pour son image de "maverick" (franc-tireur), d'homme honnête, compétent, expérimenté et modéré.
Il parle assez peu de sa famille, mais les récents services de son fils en Irak lui ont amené, si cela était possible, encore plus de sympathie de la part du public et des journalistes.
Doté d'un sens de l'humour assez piquant, qui se retourne parfois contre lui, il excelle dans les séances de question / réponse avec les électeurs et dans des conférences de presse improvisées et interminables.
Pourvu de nombreuses faiblesses, elles pourraient néanmoins ne pas être exploitées comme elles l'auraient été dans d'autres cycles. Son statut de héros américain le protège relativement auprès des media et du public, qui n'aiment pas voir un héros attaqué. En 2000, GW Bush et Karl Rove ne se sont pourtant pas gênés pour le traîner dans la boue, l'accusant d'avoir dénoncé ses anciens camarades à ses geôliers vietnamiens, d'avoir donné naissance à une fille noire hors mariage... Cependant, Obama a plusieurs fois montré son envie de ne pas utiliser d'attaques sur le caractère des McCain.
McCain a le malheur d'être républicain l'année où ils n'ont aucune chance en raison de l'impopularité record de George W. Bush. L'électorat centriste modéré n'a jamais été aussi éloigné idéologiquement des absolutistes républicains, qui par ailleurs redoutent sa relative modération. Le grand écart que doit faire chaque candidat entre le centre et les extrêmes est donc plus périlleux pour lui que pour Obama : l'écart est plus grand, et ses jambes sont plus petites.
Chaque élément de programme pouvant lui faire perdre une partie indispensable de l'électorat, il fait essentiellement campagne sur sa personne, son caractère et son expérience. Les sujets les plus importants de cette élection devraient être la guerre en Irak qu'il a toujours soutenue, et en cette période de crise, l'économie, sujet qu'il a reconnu ne pas être son point fort. Son opposition à l'avortement pourrait également lui faire perdre le soutien de nombreuses femmes indépendantes (ni démocrates, ni républicaines).
Parler de son expérience, par exemple de ses 20 ans au Sénat, c'est mettre l'accent sur son âge. McCain pourrait, à 73 ans, devenir le président élu le plus âgé de l'histoire des USA. D'après plusieurs sondages, les électeurs auraient plus de réluctance à voter pour un candidat vieux qu'un noir ou une femme. Quelques mois après l'attaque qu'a subie Ted Kennedy, à peine plus âgé que lui, cela pourrait coûter quelques points cruciaux à McCain.
L'âge de McCain met en valeur un autre de ses défauts : il est un piètre orateur, ce qui pourrait être excusable s'il n'avait pas face à lui un orateur extraordinaire. Il suffit de voir son célèbre "discours sur fond vert" et de le comparer à celui donné, en même temps, par Obama, pour voir la différence. Ses problèmes de communication sont alourdis par son incompréhension totale de ce qu'est internet. Il a admis être un "illettré informatique", même s'il a récemment affirmé être en train d'apprendre à aller sur internet...
Même sur le sujet de la personnalité, John McCain a de nombreuses faiblesses. Sa compétence en politique étrangère a par exemple été mise à mal après plusieurs bourdes, confondant par exemple sunnites et chiites, ou faisant référence à la Tchécoslovaquie 15 ans après sa disparition.
Son intégrité est également sujette à caution, depuis le scandale des Keating Five (1989-1991), cinq sénateurs ayant profité des largesses de Charles Keating en échange de faveurs, dans le plus large cadre de la crise des "Savings & Loan". L'accusation de corruption n'a pas été retenue, McCain n'ayant été finalement considéré coupable que de négligence, condamnant néanmoins, pensait-on à l'époque, la carrière politique nationale de McCain.
Son caractère est également questionné. Comme Sarkozy en 2007, on se demande s'il n'est pas trop colérique pour être président, s'il ne s'énervera pas devant les caméras (vu le précédent français, ceci ne m'empêche pas de dormir). Mais contrairement à Sarkozy, on parle aussi d'affrontements plus physiques, voire de véritables bagarres, évidemment toujours démenties.
Sa vie privée est également sujette à examen. Sa femme actuelle, Cindy, est une milliardaire philanthrope, héritière d'un distributeur de bière et fondatrice d'une ONG. Elle possède également plusieurs résidences de grand standing (dont elle n'a pas toujours payé les impôts), ne veut pas rendre publics l'intégralité de ses déclarations d'impôts (contrairement à ce que les républicains avaient exigé de Teresa Heinz-Kerry, épouse de John et héritière de la famille du ketchup, en 2004), a été accro aux médicaments anti-douleur, qu'elle a même volés pour sa consommation personnelle... John McCain l'a rencontré et séduite alors qu'il était encore marié à sa première femme, Carol, ancien mannequin, qui l'a attendu lorsqu'il était prisonnier de guerre mais qui a alors subi un accident l'ayant défigurée. Les dates exactes des mariages et divorces des McCain ont d'ailleurs fait l'objet de récents articles inquisiteurs.
Enfin, sa manière d'approcher ces élections, la primaire et la générale, laisse beaucoup à désirer, ce qui sera l'objet d'un article spécifique.